Voie dégagée pour une nouvelle gare routière

En résumé

Une nouvelle gare routière devrait être construite à côté de la piste de l'aéroport, côté Ferney. La Ville veut aussi réaménager la place Dorcière, qui continuera à accueillir certaines lignes, et rénover le vétuste pavillon qui s'y trouve.
 

Cette fois, les choses sont en bonne voie. Alors que le dossier est en discussion depuis des années, qu'on ne compte plus les propositions sans suite et les revirements, le Conseil d'Etat genevois a tranché. Une nouvelle gare routière devrait être construite au sein d'un nouveau pôle multimodal, près du bout de la piste de l'aéroport, côté Ferney, à l'emplacement de l'actuel parking P47.

Le pavillon actuel, sis place Dorcière, date de la création de la gare routière, en 1958. En 1998, son état était déjà jugé insatisfaisant. Une autorisation de construire pour la rénovation du site avait été délivrée, mais les travaux n'ont jamais eu lieu. Entretemps, de multiples suggestions d'amélioration ont été émises par la section Genève de l'Association suisse des transports routiers (ASTAG). «Nous avons proposé de déplacer les bus internationaux et les lignes régionales», se rappelle Michel Mooijman, ancien président de la section. «Pour les accueillir, nous avons évoqué Montbrillant, l'aéroport, la Gare des Eaux-Vives ou l'Etoile. Il ne s'est rien passé.»

ÉCUEILS

Ces velléités ont affronté plusieurs écueils. L'aéroport avait besoin des espaces que l'on convoitait pour son propre développement. Le transport par autocar est polluant, ce qui a entraîné des réticences à améliorer les infrastructures qui lui sont consacrées. Les responsables politiques se sont succédé et n'avaient pas forcément le même point de vue sur le dossier.

Enfin, l'autocar a souffert de la concurrence de l'aviation lowcost. «Dans les années 1990, la gare routière offrait des liaisons avec Barcelone, la Tchéquie, le Sud de la France» se souvient Michel Mooijman. «En hiver, des dizaines de cars partaient vers des destinations comme le Portugal et l'Espagne. Tout cela a disparu.» La pression pour trouver une solution de rechange a donc diminué. Le Conseil d'Etat a ainsi affirmé sa volonté de maintenir le site à la place Dorcière, pourtant mal adapté, en 2003 et en 2017.

DÉGRADATION

Pendant ce temps, le site s'est dégradé. «Les toilettes ont disparu en 2020, le pavillon de    la place Dorcière tombe en ruine», remarquait la Tribune de Genève en novembre dernier, dans un article qui a suscité de nombreuses réactions. Les services se limitent à une salle d'attente vétuste et un guichet aux horaires très limités, un photomaton et deux cabines de plastique en guise de toilettes. De plus, il oblige les autocars à entrer au cœur de la ville pour y accéder.

L'évolution du secteur a cependant rebattu les cartes. Des sociétés telles que Flixbus ou Blablacar bus ont remis l'autocar au goût du jour. Les mouvements ont recommencé à augmenter – de huit mille en 2017 à quatorze mille en 2019. «Nous nous sommes donc demandé s'il était vraiment utile de faire venir tous les types d'autocars à la place Dorcière», explique Serge Dal Busco, conseiller d'Etat en charge du Département des infrastructures. «La réponse est non; nous voulons réserver les voies de circulation à ceux qui ont vraiment besoin de les utiliser.» D'où un projet remaniant totalement la répartition des autocar partant et arrivant à Genève. 

RÉPARTITION

Les lignes de bus régionales vers la France voisine ont déjà été déplacées aux abords des gares et haltes du Léman Express, en 2019. Les cars amenant des touristes pour de brèves visites de la ville et ceux qui transportent des excursionnistes devraient rester sur le site actuel, qui a l'avantage de se trouver à deux pas de la rade, des boutiques, des hôtels et de la gare Cornavin. Les lignes amenant les skieurs vers les stations pourraient profiter des infrastructures l'hiver, quand les bus d'excursionnistes et les visites de touristes sont rares.

Les lignes internationales seront déplacées, comme l'ASTAG l'avait suggéré il y a plusieurs années déjà. Plusieurs sites ont été examinés: le Trèfle-Blanc (à côté de la gare de Lancy-Bachet), Pont-Rouge, des parkings longeant l'aéroport, notamment. Chacun a des avantages et des inconvénients.  

P47

«Plusieurs réalisations sont déjà prévues sur le site de Trèfle-Blanc, et le programme est déjà bien avancé», explique Serge Dal Busco. «Lancy-Pont-Rouge se trouve au cœur d'un nouveau centre et nous nous retrouverons dans quelques années avec le même problème d'accès qu'à la place Dorcière. L'aéroport, enfin, a besoin des parkings proches de l'Arena.» Reste l'actuel parking P47. Situé entre le bout de la piste de l'aéroport, côté Ferney, et l'autoroute, il sera très facile d'accès pour les bus internationaux. Le site est vaste – septante-deux mille mètres carrés. «Il sera desservi par un arrêt du futur tram des Nations dès 2025, qui le reliera au centreville, et se trouve à quelques arrêts de bus de l'aéroport et de sa gare CFF», poursuit Serge Dal Busco.

La surface se présente actuellement sous la forme d'un vaste parking à ciel ouvert, utilisé notamment pour garer les camions desservant Palexpo. La partie la plus proche du tarmac sera utilisée par l'aéroport, qui y créera un pôle logistique. Celle en bordure de l'autoroute sera consacrée à un nouveau pôle multimodal. Un bâtiment de quatre étages sera édifié. «Il abritera une gare routière de huit quais ainsi qu'un nouveau parking d'échange», explique Serge Dal Busco. Budgété à trente-six millions de francs, il sera construit et exploité par la Fondation des parkings. C'est aussi elle qui décidera des services que l'on y trouvera. Quant au canton, il s'occupera des accès et des espaces publics dans le cadre du projet d'agglomération. 

FLEXIBILITÉ

Le site est à même d'absorber une éventuelle hausse du trafic de cars. «Il comptera également cent trente places de poids lourds pour les exposants de Palexpo, dont cinquante abritées», explique Thierry Messager, directeur à l'Office cantonal des transports. «Si les besoins augmentent, on aura de la marge pour le gérer.» Des places attribuées aux poids lourds pourront être réaffectées, de manière temporaire ou pérenne. De plus, le bâtiment n'occupera pas toute la surface, ce qui laisse la possibilité de procéder à des agrandissements.

Le projet, présenté à la commission des transports du Grand Conseil, y a rencontré un bon accueil. La voie semble donc libre pour aller de l'avant.